Des bagarres à répétition, du harcèlement, de la défiance envers les enseignants, une professeure agressée sexuellement... Face à cela, les personnels n'évoluent pas dans un climat serein au sein de l'établissement. Ces derniers veulent retrouver le calme au collège et au lycée. Ils ont le sentiment que des mesures sérieuses face à ces faits ne sont pas prises, et ne se sentent pas soutenus par leur direction.
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Alors, depuis mardi midi, certains enseignants de la cité scolaire Léo Ferré, à Gourdon, sont en grève. Un mouvement exceptionnel pour alerter sur leur situation. Sur 68 professeurs, 20 ne faisaient pas cours ce jeudi, et deux personnels AESH étaient également mobilisés. "Depuis l'année dernière, ils ont alerté tous les canaux possibles", affirme Florence Cabrit (syndicat FSU).
Pour comprendre plus en détail les raisons de cette grève, il faut remonter en arrière. L'année 2022 a été une "année scolaire émaillée de plein d'incidents violents", estime Clément Gazal, professeur remplaçant gréviste et membre de la CGT. Des vidéos de fellation entre élèves ont tourné dans l'enceinte de la cité scolaire, des lynchages aux abords, des bagarres à l'intérieur, du harcèlement... "Un jeune a même eu la mâchoire fracturée", soupire Fabienne*, l'une des enseignantes en grève. Selon l'équipe éducative, les réponses de la direction sont "tardives" et "insuffisantes".
"Des conséquences inquiétantes sur la santé de l'ensemble des professeurs"
Face à cela, sous les conseils des syndicats, les professeurs remplissent de nombreux signalements au RSST (registre santé et sécurité au travail). En novembre 2022, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail se rend sur place pour auditionner les personnels qui le souhaitaient. En janvier 2023, le CHSCT rend son rapport. Dans un document que la Dépêche du Midi a pu se procurer, voici ce qui y est écrit : "les modalités de gestion de la cité scolaire de Gourdon par l'équipe de direction ont des conséquences inquiétantes sur la santé de l'ensemble des personnels".
Si la direction de l'établissement n'a pas souhaité s'exprimer, le Dasen du Lot (directeur académique des services de l'éducation nationale), contacté par la Rédaction, explique que pour pallier ces "difficultés rencontrées au sein de la cité scolaire", un troisième personnel de direction a été dépêché sur place dès l'an dernier. Cela ne stoppe pas le climat de violence. En mars 2023, une professeure subit une agression physique à caractère sexuel par un élève. Le conseil de discipline a lieu trois semaines après les faits. Pendant ce temps, la professeure continue de travailler et l'élève ne subit aucune mesure conservatoire. La décision : exclusion avec sursis. "L'élève aurait pu être exclu en attendant la décision du conseil de discipline. Mais il était là dès le lendemain, et est resté par la suite", soupire Ben*, un enseignant au collège.
"... les élèves ont rebaptisé l'établissement TSG : tout sauf Gourdon"
Début juillet, les enseignants déposent un préavis de grève pour le début de l'année scolaire en septembre si "rien ne change". "On redémarre dans les mêmes conditions, mais là ce n'est plus possible", regrette Ben. Clément Gazal va plus loin : "c'est la mort dans l'âme qu'on fait cette rentrée. C'est très éprouvant".
Cette année, deux classes ont fermé au sein de la cité scolaire de Gourdon : une classe de 3e ainsi qu'une classe de 2nd. "Entre eux, les élèves ont rebaptisé l'établissement TSG : tout sauf Gourdon", décrit une enseignante au collège. "Cela impacte l'image de la cité scolaire dans la ville, et l'attractivité qu'elle nous apporte. Il y a vraisemblablement des parents qui ont retiré des élèves à cause de ces problèmes. La sérénité doit être retrouvée le plus vite possible. La direction doit être aux côtés des enseignants. Il doit y avoir de la rigueur et de l'exemplarité dans les sanctions", affirme Jean-Marie Courtin, maire de Gourdon et président de la communauté de communes. Ce dernier s'est rendu jeudi matin auprès des grévistes. Des parents d'élèves se joignent, également, au mouvement de grève. "On est inquiets et désabusés. On soutient totalement les professeurs. Ils ont besoin d'être épaulés par la direction face à ces violences", indique un papa, dont deux de ses enfants sont scolarisés à la cité de Gourdon.
De son côté, le Dasen affirme suivre cette situation de près : "les services rectoraux et académiques concernés vont continuer à accompagner l’établissement pour stabiliser la situation en cette rentrée. Lors de la préparation, les difficultés de l’année dernière ont été prises en compte. Le poste de personnel de direction supplémentaire nommé pour renforcer l’équipe est reconduit cette année. Le recrutement d’un temps complet de responsable du Bureau des entreprises viendra également compléter l’équipe. Nous appelons l’ensemble de la communauté éducative à œuvrer pour permettre à l’établissement de retrouver sa sérénité". Xavier Papillon devrait, bientôt, recevoir à nouveau une délégation des professeurs. Les services de la préfecture sont au courant de cette situation, et se penchent dessus. Le piquet de grève est maintenu la semaine prochaine.
*les prénoms ont été modifiés pour garantir l'anonymat
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